Mont Neiglier
La sente mène au pied du Neiglier (au fond) en longeant des dentelles rocheuses.
L'itinéraire est simple : au départ de la Madone de Fenestre (1900 m), remonter au sud-est le vallon du Ponset, laissant à gauche le mont homonyme, jusqu'au petit collet (environ 2350 m) donnant sur les lacs de Prals. De là, trouver à gauche la sente qui longe le pied de l'impressionnante barre rocheuse déchiquetée qu'est la crête ouest du Neiglier. La sente se perd alors dans le cône d'éboulis que l'on remonte jusqu'au couloir oblique menant au sommet. Ce couloir est un « clapier suspendu », c'est-à-dire que les éboulis sont instables.
Je crois que c'est ce couloir qui n'a pas plu à mon coéquipier. Son teint naturel de « freerider » s'est progressivement mû en pâleur fébrile à mesure que nous progressions. Pourtant, tant bien que mal, nous avons atteint le haut du couloir, qui se termine sur un à-pic vertigineux, que l'on esquive rapidement en partant sur la droite rejoindre le sommet (2786 m).
L'émotion est telle au sommet qu'il faut se tenir aux rochers!
Là, mon coéquipier a nerveusement rempli le livre d'or du lieu comme s'il confiait ses mémoires, tout en contemplant le tour d'horizon s'ouvrant sur toute la haute-Vésubie, dominée au nord par le Gélas. Les nuages qui nous masquaient le Grand Capelet menaçant de nous engloutir, nous avons immédiatement envisagé notre descente.
Le panorama s'ouvre au nord vers le Gélas
C'est alors que mon coéquipier (dont je tairai ici le nom) extirpa de son sac à malices un bout de corde de 5 mètres tout au plus, piqué à sa petite soeur (peut-être une vieille corde à sauter ?), avec laquelle il entreprit de nous encorder. C'est donc en dansant la chenille que nous avons redescendu prudemment le redouté couloir. Autant dire tout de suite que les choucas volaient sur le dos pour ne pas voir cette misère, et que même les chamois les plus aguerris nous observaient incrédules, voire effarés quand moult pierres dévalaient la pente avec fracas sous la poussée de nos pas - et surtout de mon piolet.
Retour aux Lacs de Prals dans leur robe d'automne
Enfin revenu sur les plus sages pelouses, et encore ébahis par tant d'émotion, nous avons dévoré notre pic-nic face aux lacs de Prals dans leur robe d'automne, rappelant les couleurs des landes écossaises, en rêvant déjà au délicat fumet du vin chaud du refuge de la Madone. Malheureusement fermé ce jour là...
Une ribambelle de chamois nous attendait pour saluer notre exploit
Mais au fond, tout ce qui compte aujourd'hui, c'est que l'on puisse déclamer : « Le Neiglier ? Ouais, on l'a fait ! ».